Fiscalité des ICO (Initial Coin Offerings) pour les investisseurs et les émetteurs
La fiscalité des crypto-monnaies va au-delà du trading et de l'achat-vente. Les Initial Coin Offerings (ICO) constituent un domaine différent et nécessitent une compréhension spécifique. Une ICO est similaire à une introduction en bourse (IPO), mais elle utilise des jetons numériques (tokens) au lieu d'actions. En France, la loi PACTE a introduit une régulation pour les ICO, sans toutefois statuer sur la fiscalité.
L'ICO est distincte de l'achat-vente de crypto-actifs et ne doit pas être confondue avec cette dernière.
Il est crucial de comprendre la différence entre les jetons d'usage (utility tokens) et les jetons de sécurité (security tokens), car la fiscalité varie. Les utility tokens donnent accès à un service futur, tandis que les security tokens sont assimilables aux titres financiers d'une entreprise.
La fiscalité applicable aux émetteurs d'ICO diffère selon qu'il s'agisse d'utility tokens ou de security tokens.
Concernant les utility tokens, l'AMF assimile ces jetons à des biens meubles incorporels, et la TVA ne s'applique pas tant que l'obligation réciproque reste incertaine. Pour les security tokens, la TVA ne s'applique pas en raison de leur nature.
La fiscalité applicable aux investisseurs dépend également du type de token et du statut de l'investisseur (personne physique ou morale). Pour les utility tokens, les personnes physiques sont soumises au prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30%, tandis que les personnes morales doivent se référer à d'autres sources, comme le règlement de l'Autorité des normes comptables. Pour les security tokens, l'opération est fiscalement neutre pour les personnes morales, mais les plus-values lors de la cession sont imposables.
La loi de finances pour 2019 a précisé que les échanges entre actifs numériques ne sont pas imposables. Toutefois, dès que ces actifs sont convertis en monnaie fiduciaire ou utilisés pour l'achat de biens ou services, la plus-value générée devient imposable. Si l'investisseur exerce cette activité de manière occasionnelle, la plus-value est soumise à la "flat tax" de 30 % (12,8 % au titre de l'impôt sur le revenu et 17,2 % au titre des prélèvements sociaux). En revanche, si l'investisseur exerce cette activité de manière habituelle, la plus-value est soumise au régime des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).
Avant de se lancer dans une Initial Coin Offering (ICO), il est important de bien comprendre la fiscalité associée à ce type de levée de fonds. Les ICO représentent un moyen innovant de lever des fonds en émettant des jetons numériques sur la blockchain en échange de cryptomonnaies. La fiscalité des cryptomonnaies étant attractive, de nombreux entrepreneurs et investisseurs sont séduits par cette option.
ICO et investisseurs personnes morales
Aucune disposition spécifique ne traite de la fiscalité des ICO pour les investisseurs personnes morales. Dans ce cas, il convient de se référer au règlement 2018-07 de l'autorité des normes comptables, qui distingue deux situations :
- Si l'investisseur a l'intention d'utiliser les droits conférés par l'utility token, celui-ci est comparable à une immobilisation incorporelle amortissable sur la durée d'utilisation.
- Si l'investisseur ne souhaite pas utiliser les droits conférés par le token, celui-ci est comptabilisé dans le compte "jetons détenus" et évalué à la clôture de l'exercice sur la base des dernières informations fiables disponibles.
TVA et ICO
Pas de TVA si la contrepartie est incertaine
L'administration fiscale rappelle que la TVA s'applique lorsqu'il existe un lien direct entre le service rendu ou le bien acquis et la contre-valeur perçue. Cependant, lors de l'émission des tokens, l'investisseur se voit accorder un droit d'usage conditionnel, ce qui crée un aléa sur les contreparties futures. Cet aléa empêche la caractérisation du lien direct et, par conséquent, l'assujettissement de l'opération à la TVA.
Aussi, les opérations de change des actifs numériques contre des devises traditionnelles, ainsi que les opérations de change entre actifs numériques, sont exonérées de TVA, conformément à l'article 261 C, 1° du CGI.
TVA si la contrepartie est certaine
Si l'ICO permet à l'investisseur d'acquérir des jetons donnant accès à des biens ou services déterminés, ces jetons sont qualifiés de bons à usage et l'opération est soumise à la TVA au taux de 20 %. La base d'imposition est alors constituée par l'ensemble des sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de ces opérations, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations, conformément aux dispositions de l'article 266 du Code général des impôts (CGI).
Fiscalité des ICO pour les émetteurs
La fiscalité de la société à l'initiative de l'ICO ne fait l'objet d'aucune réglementation précise. Dans ce contexte, il convient de se référer à l'Autorité des normes comptables qui préconise de traiter comptablement les utility tokens émis comme un produit constaté d'avance.
À la clôture de l'exercice, ces produits seraient ainsi rapportés au résultat imposable de la société qui, selon sa forme sociale ou le choix de ses dirigeants, sera soumise à l'impôt sur les sociétés (IS) ou à l'impôt sur le revenu (IR) entre les mains des associés.
La fiscalité des ICO est complexe et doit être abordée avec prudence par les investisseurs et les émetteurs. Pour assurer une bonne compréhension des implications fiscales et une gestion optimale des risques, il est recommandé de consulter des experts en fiscalité des cryptomonnaies.
Il est possible que la législation évolue, étant donné le flou persistant sur certains points et la complexité du régime fiscal actuel. Les évolutions potentielles pourraient être abordées lors du premier bilan du visa de l'AMF.